L’économie de l’ombre, l’évasion fiscale et les vols sur le lieu de travail se répandent en Lettonie à la faveur de la crise qui promet pour cette année à ce petit pays balte de 2,3 millions d’habitant une chute de 18% du Produit intérieur brut.
Ainsi, Alexandrs, 26 ans, un ouvrier du bâtiment qui n’a pas touché son salaire durant plusieurs mois a décidé de se servir. En guise de salaire, il a utilisé les matériaux de construction de son employeur pour rénover la salle de bains de son trois pièces. Il était payé en liquide par une société privée pour son travail sur un chantier public de rénovation d’une école de la capitale Riga et il explique avoir « pris ces matériaux comme forme de rémunération ».
De plus en plus d’entreprises et de salariés survivent en payant et en se faisant payer sous la table afin d’échapper à l’impôt, aggravant encore la situation des finances publiques du pays. Selon les différentes estimations, l’économie souterraine représente entre 15% et 40% du PIB. Des cas vécus ou constatés montrent que certains grands magasins ne facturent plus la TVA et que des entreprises se sont mises à payer leurs salariés en liquide.
Une vidéo diffusée sur le site youtube.com et très regardée par les Lettons montre une femme recevant son salaire dans une enveloppe dans une chaîne de distribution d’équipements électroniques. La société en question, Elkor, a ensuite nié publiquement toute évasion fiscale. « Payer des impôts en pleine crise aurait précipité bien des entreprises dans la faillite », a déclaré Janis, propriétaire d’une société de bâtiment et travaux publics, qui préfère cacher son nom de famille. « Aujourd’hui, il n’est question que de survie », dit-il. La députée Ilma Cepane accuse la tendance de ses compatriotes à contourner l’impôt d’être une des causes de la crise dans cette ex-république soviétique. « Chaque Letton est en partie responsable de ce qui se passe dans ce pays », a-t-elle dit dans une récente interview.
« Aujourd’hui, tout le monde se bat pour survivre, mais nombre de citoyens ne signent pas de contrats de travail et reçoivent leur paie dans des enveloppes. Ils s’engagent souvent dans des affaires pas très nettes et sont biens contents de payer des pots-de-vin », a-t-elle ajouté. Mais les sondages montrent aussi que le gouvernement a perdu la confiance du public.
Le ministère des l’Affaires sociales affirme que certaines compagnies ne payent pas leurs cotisations sociales. Le Premier ministre Valdis Dombrovskis a récemment admis devant les journalistes que des sociétés publiques figuraient parmi les resquilleurs. L’on craint également que les hausses d’impôts recommandées par les créanciers internationaux de la Lettonie aient pour effet de stimuler davantage l’économie parallèle. « Ils ne voient pas le pays dans une optique socio-économique mais à travers un prisme financier », a déclaré au sujet du FMI Elina Egle, directrice de la confédération des patrons lettons.
Ce pays balte a déjà été forcé de réduire les salaires de la fonction publique, les retraites et les subventions accordées à la naissance d’un enfant pour répondre aux exigences d’un prêt de 7,5 milliards d’euros, accordé par le Fonds monétaire international, l’Union européenne et d’autres bailleurs de fonds.
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