Concernant les transports de passagers, les opinions publiques ont été profondément sensibilisées par les accidents maritimes les plus récents, qui ont affecté un secteur des transports en plein développement : le ’Scandinavian Star’ en 1990 et surtout, le ferry ’Estonia’, reliant Tallinn (Estonie) à Stockholm qui a fait près de 900 morts en mer Baltique le 28 septembre 1994.
Les suites du naufrage de l’Estonia
Ce sont sans doute les suites données au terrible naufrage du transbordeur à passagers « ESTONIA », qui feront le plus références en matière de sécurité de ce type de navire pour les prochaines décennies.
En effet, peu après cet accident, à l’initiative du Secrétaire Général de l’OMI et sous la pression des Etats nordiques et du Royaume-Uni, un groupe de 22 experts internationaux a procédé à la révision complète des règles de sécurité des navires à passagers, en particulier des navires transbordeurs, et a déposé mi-1995 une trentaine de propositions d’amendements à la Convention SOLAS, qui ont été pour la plupart adoptées lors d’une Conférence tenue au siège de l’OMI à Londres en novembre de cette même année. Ces améliorations portent sur l’équipement et l’exploitation des navires et constituent, à elles seules, une avancée très importante en matière de sécurité :
– qualification des équipages (refonte de la Convention correspondante STCW en juillet 1995) ;
– dispositions constructives, en particulier en matière de résistance des portes du pont garage ;
– restrictions apportées à l’utilisation des portes étanches lorsque le navire est en mer ;
– étanchéité du cloisonnement ;
– interdiction d’accès au pont roulier en mer ;
– contrôle continu des fermetures ;
– échappées ;
– protection incendie des locaux de catégorie spéciale ;
– communications ;
– drome de sauvetage ;
– zones d’hélitreuillage et aménagement de plate-forme hélicoptère pour les navires neufs ;
– renseignements concernant les passagers (établissement de listes nominatives) ;
– récupération des naufragés ;
– systèmes d’aide à la décision à l’usage du capitaine ;
– installations radioélectriques et transmissions de détresse ;
– personnel chargé des communications de détresse ;
– obligations du capitaine en matière de détresse ;
– pouvoir discrétionnaire du capitaine en matière de sécurité de la navigation.
Par ailleurs, eu égard à leur conception spécifique, la stabilité après avarie des navires transbordeurs à passagers, qui sont dotés d’un pont-garage étendu sur toute leur longueur, ont fait l’objet d’une attention toute particulière : les normes « SOLAS 90 » ont été rendues applicables à tous les navires de ce type construits avant le 29 avril 1990, selon un calendrier étalé jusqu’à 2005, les navires non modifiés à cette date devant être retirés du service. Ainsi, de tels navires ayant subi une avarie de coque grave concernant deux compartiments étanches sous la flottaison et ayant conduit à l’envahissement du pont-garage, resteront à flot suffisamment longtemps pour permettre la complète évacuation des passagers et de l’équipage par forte mer. Par ailleurs, un accord régional européen renforce encore ces dispositions.
Cet accord régional, dit « accord de Stockholm », où il a été adopté en février 1996, s’applique aux « car ferries » de l’Europe du Nord. Il consiste à prendre en considération une pénalité artificielle correspondant à une certaine hauteur d’eau sur le pont garage, fonction des états de mer et du franc-bord, avec un maximum de 50 cm. Toutefois, même si les armateurs français l’appliquent sur la Manche, la France a conditionné son accord à l’adoption de mesures analogues pour le Sud Europe, pour lesquelles elle est intervenue auprès de la Commission européenne qui doit lancer une étude à ce sujet.
Les mesures adoptées au niveau mondial sont en principe applicables à tous les navires construits à partir du 1er juillet 1997 et un grand nombre d’entre elles, dont en particulier celles relatives à la stabilité, à l’incendie et à l’évacuation, applicables rétroactivement aux navires transbordeurs construits avant cette date selon un calendrier prévu s’étaler au pire jusqu’à 2005.
Au niveau européen, la directive 98/18/CE du 17 mars 1998 établissant des règles et normes de sécurité pour les navires à passagers effectuant une navigation nationale a été transposée et est entrée en vigueur le 12 août 2000. Elle impose les prescriptions de la Convention SOLAS à ces navires avec quelques assouplissements en fonction de la proximité de la cote.
Les navires qui navigueront au début du XXIème siècle répondront donc à ces nouvelles mesures tirées des enseignements de la dernière décennie. Mais la réflexion se poursuit pour améliorer encore la sécurité : établissement de nouveaux critères relatifs à la toxicité et au dégagement des fumées émises par les matériaux en cas d’incendie, recherche en matière de fiabilité des installations de propulsion et de sécurité, recherche de nouveaux moyens de sauvetage à redressement automatique et de moyens d’évacuation rapide des passagers, recherche de nouvelles dispositions afin de rétablir rapidement la stabilité d’un navire en situation d’avarie affectant gravement sa coque, etc.
Enfin, la sécurité reposant en grande partie sur les hommes, une surveillance approfondie et permanente des conditions d’application des règlements portant sur la conception des navires, leur exploitation et leur maintenance, a été mise en vigueur à partir du 1er juillet 1998 en application du Code de gestion de la sécurité adopté par l’OMI.
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